dimanche 1 janvier 2012

Des mots, une histoire : petit exercice d'écriture 5 (enfin la suite!)

Je suis terriblement en retard sur la suite de l'écriture de mon histoire dont les premiers épisodes sont ici (1, 2, 3, 4) mais heureusement pour moi, Olivia, qui propose ce jeu d'écriture, était en vacances pour 3 semaines ! Alors avant qu'une autre récolte de mots ne se fasse, vite, vite, la suite !

Les mots imposés pour cette édition sont : mécréant, certificat, douces, bises, givré, gluten, adresse, rafale, tendresse, excuse, bruire, catastrophe, autarcie, perce, vaporeux, rugby, découverte, ivresse, possible, carte, intimité, espiègle, pile, prière, page, licorne, aphrodisiaque.

Son coeur battait à tout rompre, elle n'en revenait pas d'avoir été si culottée. Mais cela faisait du bien, pour une fois, d'avoir l'impression de mener la danse. Avec un port de tête et une droiture digne d'une Jane Bennet, elle se dirigeait vers le coin de la rue, se demandant à chaque pas si elle était en train de faire la plus grosse erreur de sa vie. Elle sentait sur son dos le regard brulant et tourmenté de Pierre. Devrait-elle se retourner ?  Qu'aurait fait Léa à sa place ? Justement, elle savait précisément ce que son amie d'enfance aurait fait : elle se serait faite inviter et l'aurait ramené chez elle ensuite, en guise de remerciement... Mais Fleur n'avait pas ce type de tempérament, elle était très romantique et elle sentait que de toute manière, avec cet homme, c'était différent. Plus que quelques pas et elle serait hors de vue. Son sang afflua violemment dans ses tempes. Allez, se dit-elle. Ne sois pas sotte, et retourne-toi ! De toute façon, il ne te regarde peut-être même plus, il n'est peut-être plus là...

Mais il était bien là, grand et beau, la mer s'étendant derrière lui, le soleil couchant teintant le ciel de touches mordorées. Fleur eut l'image fugace, face à ce ciel grandiose, d'un artiste ayant mélangé sur sa palette de simples couleurs primaires qui auraient donné toutes ces teintes chaudes, en passant de l'ocre à l'orangé, du rose au safrané. Un peu plus loin, le bleu nuit commençait à assombrir toute cette aquarelle magique.
Cette ivresse poétique ne l'avait saisie qu'un instant et elle porta ses yeux sur lui. Elle s'était arrêtée sans s'en rendre compte, et plus rien de la jeune fille espiègle de tout à l'heure ne transparaissait dans ce regard profond et sincère qu'elle lui lança.
" J'ai oublié de vous dire, qu'il est tout à fait possible qu'on se rencontre par hasard demain, vers midi, au même endroit. Je dis bien par hasard ! " lui dit-elle les mains un peu tremblantes, alors que toujours immobile, il l'enveloppait d'un regard plein de tendresse. Puis elle disparut subitement.

Pierre, d'abord angoissé, s'était senti soulagé en l'entendant prononcer cette petite phrase drôle qui dévoilait un peu plus sa personnalité. Cette rencontre lui avait fait beaucoup plus de bien qu'il n'aurait pu imaginer, découvrit-il en marchant sans but sur la grève tandis que la bise se levait et soufflait parfois par rafales. Tout cela paraissait tout de même bien trop idyllique, ces scènes n'arrivent que dans les livres, pas dans la vraie vie ! Mais bon, ce qu'il ressentait était réel, l'intimité qui semblait s'être installée entre eux aussi. Sa vie avait été bien morne ces derniers temps, alors pourquoi ne pas attendre de voir la suite ?
Il vivait en quasi-autarcie depuis si longtemps qu'il n'avait pas imaginé qu'un tel contact humain puisse percer sa carapace si soudainement. Il avait fait des choix de vie qui l'avaient coupé de sa mère, qui n'avait que lui pourtant, parce qu'elle rêvait qu'il devint un grand joueur de rugby. Mais la violence de ce sport l'avait toujours rebuté, bien qu'il eut la carrure d'un de ces 'dieux du stade' comme on dit. Et elle lui avait fait mener une enfance si malheureuse qu'il avait du couper le lien. De toute façon, il n'aurait pu imaginer possible une vie qui le priverait de ce contact avec la nature qu'il chérissait tant. Et elle ne l'avait pas supporté. Pourtant, elle aurait du comprendre que parmi les plantes et les bêtes, il se sentait respirer, plein, vivant, utile. Il était devenu ornithologue parce que les oiseaux le fascinaient, mais il aurait bien pu devenir éthologue ou herpétologue.

Tandis qu'il laissait son esprit vagabonder, il repensa à Fleur. Cette personne était incroyable. Elle lui avait raconté plein de choses sur son enfance heureuse, par exemple qu'elle adorait faire des cadavres-exquis avec sa mère, et qu'elle avait récemment retrouvé un carnet qui en était rempli, dont le titre était "Le gluten givré est un aphrodisiaque pour les licornes vaporeuses". Un sacré phénomène qui ne l'avait pas laissé de marbre, mais l'avait marqué d'une sorte de brûlure inconnue dans le ventre, pas du tout désagréable d'ailleurs. Il espérait vraiment la revoir, et ce qu'il lui avait dit dans un accès de fièvre était aussi réel qu'inattendu. Il n'arrivait pas encore à mettre de mot sur ce sentiment nouveau né de ce coup de foudre puissant.

En rentrant dans sa petite maison aux volets verts, il prit une douche, alluma la radio et se remit à étudier les cartes du Cachemire. Il fit la liste de tout ce qu'il lui restait à faire d'urgent : il aurait besoin d'un certificat spécial pour le safari en éléphant, et tandis qu'il écrivait, l'image de Fleur lui revint devant les yeux. Il fourragea dans ses cheveux pour essayer de se concentrer mais impossible de chasser ce visage aux traits fins, aux pommettes saillantes, aux grands yeux verts rieurs, aux cheveux coupés courts comme dans les années 1920. Dans son rêve éveillé, les lèvres pleines et roses, qui s'ouvraient sur deux rangées de belles dents blanches et droites, semblaient lui faire une prière dont il ne parvenait pas à saisir le sens ; ce n'était qu'un bruissement confus.

Quelque chose chuta soudain dans la maison et le fit revenir à la réalité. Il se leva d'un bond en monta dans sa chambre. "Quelle catastrophe as-tu donc encore faite, toi ?" demanda-t-il au petit chaton qui était perché sur une pile de livres près de son lit, l'air innocent. Il trouva l'objet du crime : il avait fait tomber les livres qui étaient en équilibre précaire sur la table de nuit. "Bon, tu as la bonne excuse d'être mignon, sale petit mécréant" articula-t-il en le caressant.
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4 commentaires:

  1. Chouette, les nouvelles aventures!!!! Je te suis avec plaisir comme à chaque fois...
    Génial l'idée du cadavre exquis pour caser les mots difficiles!!!

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  2. Hihi merci :-)

    Oui, en fait, j'ai retrouvé une création que j'avais faite au collège, pleine de cadavres exquis, à noel, et donc j'y ai repensé... ;-)

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  3. Ca se construit dis-moi ! Et avec des indices qui nous laissent sur notre faim...

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  4. Julie : Oui, j"ai en tête beaucoup de chapitres suivants... Reste plus qu'à, comme on dit ;-)
    J'espère que la suite vous plaira!

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