dimanche 13 janvier 2013

La crise est passée

Vous vous en souvenez, je disais que j'avais besoin de trouver un lieu de retraite le plus vite possible, sinon je ne donnais plus très cher de ma peau (ni de mon voyage !) Un matin, n'y tenant plus, j'ai téléphoné dans une guest-house à Auroville, j'ai dit "Je craque, je dois quitter Trivandrum, j'ai besoin que vous me donniez une chambre lorsque j'arriverai, dans deux jours." Malgré la période ultra touristique à Auroville, André m'a donné une petite chambre simple, m'a accueillie à bras ouverts, et j'ai enfin pu arrêter de pleurer toutes les cinq minutes.
J'avais hésité à aller à Auroville, j'avais entendu tant de choses contradictoires... et pourtant, il m'a paru clair que c'était le seul échappatoire possible. Dès que je suis arrivée, une paix intérieure m'a envahie, je me suis sentie terriblement mieux. Il y a quelque chose dans l'air qui apaise l'esprit. J'ai décidé de prendre mon temps, de laisser les choses venir à moi. Le temps passe toujours aussi lentement, mais cela permet de faire plein de choses. J'ai commencé à prendre des cours de yoga, à suivre des conférences, j'ai fait une journée de workshop sur l'Intelligence Collective (je vous en reparlerai plus tard, car c'était passionnant). Tout est à disposition ici pour le développement personnel, le calme, la découverte. Je n'ai pas encore percé tous les mystères du fonctionnement d'Auroville, mais comme c'est une Utopie qui fonctionne depuis pas mal d'années, je trouve intéressant de s'y tremper un peu. Je pense même y rester quelques semaines, voire jusqu'à l'expiration de mon visa, qui sait ? Il y a une concentration de gens passionnants (certains sont perchés, mais après tout, chacun trouve ici sa place me semble-t-il) et il y a quand même des villages indiens au sein même d'Auroville. Je suis allée deux fois à Pondichéry, j'essaye de me replonger dans le bain indien mais je dois avouer que j'ai du mal à supporter ça plus de quelques heures maintenant. Ici je suis bien, dans une sorte d'enclave où tout est possible. J'ai une petite mobylette qui me permet d'aller partout, et je découvre le plaisir de rouler sans but, pour laisser les pensées passer, ressentir la forêt, apprécier les paysages, sentir l'air frais sur le visage. Ca me plait bien !
Ma nouvelle question est : où vais-je donc aller après l'expiration de mon visa pendant le mois où je vais devoir attendre un nouveau visa indien ? Mystère...
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jeudi 3 janvier 2013

J'explose !

C'est sans doute la fatigue, c'est sans doute la nouveauté du sud vs nord, c'est sans doute que mes attentes sont déçues, c'est sans doute parce qu'il fait une chaleur de fou, c'est sans doute... il y a un tas d'hypothèses qui pourraient expliquer mon état. Cela fait plusieurs jours que j'essaye de passer outre mais je ne peux plus faire autrement que de le dire : JE N'EN PEUX PLUS !
Aurélie (du blog Itinérance asiatique) me dit que 3 mois est un cap difficile et important dans un voyage. Me voilà en plein dedans alors, puisque ça fait plus de 3 mois et demi que je suis partie. Depuis 3 semaines que je suis dans le sud, je ne pense qu'à une chose : LA FRANCE ! Si le nord était atrocement sale, les gens violents et que tout demandait un effort surhumain (surtout dans les négociations et l'échange en anglais), le Kerala m'aura complètement anéantie. J'ai eu droit au mercantilisme de noël autant qu'en France puisqu'il y a ici une majorité de catholiques, vous n'êtes pas les seuls. Tout est bien plus construit ici mais du coup, il s'en dégage une sorte d’obscénité qui me dérange. Tout est horriblement cher à cause de la période touristique, on voit des gambettes blanches et des soutiens-gorges à peine cachés par des tee-shirts trop lâches, bref on se croirait sur la plage de Saint-Tropez en plein mois d'août.... Avec des indiens qui n'en peuvent plus de toute cette chaire et vous sussurent des trucs quand vous passez près d'eux.
Le Kerala est un Etat réputé pour être le plus éduqué, le plus avancé, avec 100% de gens lettrés. Et pourtant. Et pourtant, les kéralais sont aussi grossiers qu'ailleurs, ils vous marchent dessus sans vergogne, ils vous aboient dessus quand vous approchez de leur magasin, les conducteurs de bus sont aussi fous qu'au Népal (rappelez-vous mon aventure), d'ailleurs hier mon bus a eu un accrochage avec un camion (le conducteur pensait peut-être que son bus était rétractable comme celui dans Harry Potter).
Je vous le dis, on ne se rend pas compte de la chance qu'on a en France. Fleur de Menthe me disait une chose très juste qu'a dit un auteur récemment : "Lorsque je rentre en France de mes voyages, je me dis chaque fois que je mets les pieds dans un Paradis où tous les occupants se croient en Enfer." 
Et c'est vrai. On se plaint, mais comme c'est bien : des prix fixes, des gens qui font la queue, des voiries propres, des autoroutes clean, du goudron partout, des trottoirs... Jamais je n'aurais cru parler un jour de raffinement français... je ne suis pas chauvine, en général...

J'ai besoin de me recentrer, de faire le point. Il faut que je retrouve le sens de ce voyage. C'est clairement une nouvelle phase qui se dessine pour moi, mais l'entre-deux est difficile à vivre. Comme j'aimerais pouvoir dormir jusqu'à ce que tout soit réglé, que décision soit prise, que l'aventure continue positivement ! Presque 4 mois de marathon, de visites, d'énergie dépensée, de rencontres. C'était chouette ! Mais je m'essouffle et mon moral est complètement à plat.
Avant je m'amusais des manières rustres des indiens, de leurs façons étonnantes de s'habiller et de se comporter. Aujourd'hui, c'est Hiroshima à l'intérieur. Je n'ai plus aucune patience, aucune compréhension. Un  hotel qui me prend une réservation et qui à mon arrivée me dit "no we are full sorry, pick season" a de quoi me faire faire un scandale. L'homme qui me tousse au visage ou rote devant moi tandis qu'on est à table manque de se prendre une raclée dont il se souviendra. Ce matin, j'ai explosé car alors que je faisais la queue au musée, des types en pagne, torse nu et pied nus (j'aime bien dire qu'ils sont en pagne, en fait c'est un dhoti) me poussaient, leur peau suintante et odoriférante collant à ma peau, et m'ont bousculée pour passer devant. Elle ne s'est pas laissée faire la Blanche, ça je peux vous le dire ! Mais ce que je peux dire aussi, c'est qu'en Inde on ne peut pas avoir une tolérance zéro, sinon on est fichu. Alors, est-ce que je suis fichue ? Ce que je sais, c'est que j'ai besoin d'isolement, et vite ! C'est une question de jours, d'heures...
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mercredi 2 janvier 2013

De la relativité de l'argent

Aujourd'hui, j'ai pris un bus de Fort Cochin à Trivandrum (oui, on dirait le nom d'un camp romain dans Astérix). Le trajet durait 6h, et coutaît 143 roupies. J'ai tendu au contrôleur moustachu mes 200 roupies, et il m'a rendu 50 roupies au bout de 2h. Je lui ai demandé le reste de ma monnaie : il m'a dit des choses fumeuses que je n'ai pas comprises, sans doute parce qu'il parlait moitié anglais moitié malayalam (la langue kéralaise). J'ai attendu, je me suis dit qu'il avait largement le temps de me rendre mes 7 roupies. Mais alors que je les lui ai demandé une seconde, puis une troisième fois, j'ai bien saisi qu'il ne me les rendrait jamais. J'ai bouilli de rage, mince alors, 7 roupies, c'est un grand chaï, c'est 2 bananes et demi, c'est un samosa, un sachet de peanuts grillés, c'est... la liste est longue. 7 roupies, c'est un dixième du salaire du paysan, un centième de mon budget quotidien... Bref, en Inde, 7 roupies ça n'est pas rien, et j'étais agacée de me faire encore voler (oui, j'ai plein d'histoires à vous raconter...). Mais alors que j'allais les lui réclamer pour la quatrième fois, je me suis retenue et j'ai tenté de mettre les choses en perspective. 7 roupies, c'est un centime d'euros. Ce centime qui fait toute la différence pour les consommatrices, entre un produit à 9,99€ et 10€. Mais qui n'a pas fait tomber un centime d'euro et l'a laissée là parce que ce n'est pas grand chose ? Un centime d'euros, ça n'achète rien. C'est psychologique. Mais ici ça peut remplir un ventre, payer des médicaments, réparer un vélo, payer un peu d'essence. Je les lui ai laissées bien sûr. Cette mise en perspective m'a fait avoir honte de mon comportement. Mais ce n'est pas pour quelques piécettes que je me bats, mais pour le fait que les étrangers se font sans cesse avoir ici. Pour tout. On a un pouvoir d'achat complètement dingue ici, si vous saviez ! Mais est-ce une raison pour payer 10 fois le prix local ? Pour ne pas récupérer sa monnaie ? Une indienne ne laisserait jamais un commerçant garder une roupie de monnaie. Alors pourquoi devrions-nous laisser passer ça ? Si on se place dans une nouvelle perspective, pouvons-nous imaginer en France de faire payer plus cher des japonnais juste parce que ça se lit sur leur visage qu'ils sont étrangers ?
Ici, ma relation à l'argent change. Je me bats pour quelques centimes d'euros tous les jours, alors qu'en France, je dépense bien plus volontiers. Pensez-y : une baguette coûte 1,10€. Ici, pour 100 roupies, on a beaucoup de choses... C'est le principe d'être vue comme un portefeuille sur pattes me déplaît tant, et je calque mon comportement sur les indiens, je les interromps pendant leur chaï pour leur demander combien ils l'ont payé, j'apprends les chiffres en hindi pour pouvoir comprendre les négociation au marché. J'essaye de tenir un budget très serré, rognant sur mon confort, sur la propreté, sur la tranquillité d'esprit. Mais il devient nécessaire de prendre en compte cette relativité de l'argent parfois, sinon toute l'énergie y passe. Trouver le juste milieu, mais ce n'est pas simple...
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