Les mots imposés pour l’édition 48 de Des mots, une histoire d'Olivia sont : pilier – autocollant – mistral – défaillir – canot – photo – anthropomorphisme – gazelle – soupe-au-lait – sincère – assouvir – dormir – vent – souffler – bouilloire – désir – chaleur d’hiver – animalisme – douleur
Le livre fit un bruit sec lorsqu'elle le referma. Décidément, ce livre était trop mauvais, et l'histoire de cette idiote de Joséphine, qui maltraitait tout le monde, et surtout ce pauvre Baptiste, la rendait folle d'écœurement. Les choses ne pouvaient-elle donc jamais être simples, même dans un roman de gare à l'eau de rose ?
Elle se leva et fourra le livre dans une des grandes poches de ce manteau trop large pour elle, qui avait appartenu à son grand-père et auquel elle tenait énormément. Elle se promena sur la grève, emmitouflée jusqu'aux oreilles, le vent caressant doucement son visage. Le soleil dardait ses rayons irisés, diffusant dans son corps cette étonnante chaleur d'hiver qu'elle ne ressentait qu'ici. Elle était si bien, pour rien au monde elle ne serait retournée passer les fêtes dans ce chalet familial où, lorsqu'elle en franchissait la large porte, une bouffée de souvenirs l'assaillaient. Elle n'y était retournée qu'une fois depuis la mort de sa mère, cela lui avait suffit pour décider de n'y jamais retourner. Tout était si triste : ses soeurs qui feignaient la joie et imitaient les gestes que l'on se doit d'accomplir : décorer le chalet, faire un sapin, passer leurs journées aux fourneaux. Et son père, au caractère de plus en plus soupe au lait, qui trainait de pièce en pièce sa douleur et son air d'absence au monde. Sa mère, le pilier de la famille. Elle lui manquait tant. Des larmes inondèrent son visage, rafraichissant ses traits déformés soudain par le chagrin et le souvenir.
Elle sortit d'une autre poche une photo qu'elle gardait toujours avec elle : c'était sa préférée. Elle la regarda tendrement : son père, sa mère et elle, dans un canot aux airs de pirogue, en Afrique, à l'affût d'une gazelle. Ils en avaient vu toute une horde boire au détour d'un coude de la rivière, quelques instants à peine après que le guide eut pris ce cliché. Elle avait été si émue par les bébés gazelles, qu'elle voyait en eux des animaux de compagnie, et même des amis. Elle avait été déchirée en apprenant que sa naïveté d'enfant lui faisait faire de l'anthropomorphisme là où il n'y avait que bêtes sauvages. Dès son retour, elle avait voulu des autocollants de gazelles, et les collait partout car c'était devenu son animal préféré. Sa maman avait été bien patiente de la laisser faire pendant toute cette période. Au souvenir d'une gazelle qu'elle avait collé sur son propre front un jour, elle rit aux éclats et essuya ses larmes du revers de la main, effaçant d'un coup sa tristesse et sa mélancolie.
Le mistral se levait, elle ajusta son col et rangea sa photo pour s'absorber toute entière dans la contemplation de cette mer calme et sombre. Elle distingua une silhouette au loin, qu'elle n'avait pas vue d'abord. En plein soleil, cet homme semblait offrir tout son corps aux mouvements des vents et aux rayons du soleil. Elle se rapprocha, ses pieds s'enfonçant dans le sable fraîchement pelleté qui exhalait une odeur d'algues. A son approche, l'homme eut un sursaut et se retourna brusquement : il était pris en flagrant délit de rêverie. Elle s'attendait peut-être à un homme d'âge mûr, mais certainement pas à cet apollon aux allures d'Indiana Jones d'une beauté indicible et saisissante. Elle s'était toujours imaginé l'homme de ses rêves ainsi : un corps massif et protecteur avec des yeux révélant une profonde douceur. Ils étaient d'une sincérité troublante.
Alors qu'ils semblaient envoutés dans ce silence de la découverte, elle se sentit défaillir sous le poids de ce regard si pur. Elle n'osait pas bouger, et sentait qu'un désir inassouvi s'était brusquement ravivé en elle. Si elle partait maintenant, elle savait ce qu'il se passerait. Elle rentrerait allumer la bouilloire qu'elle avait remplie avant de partir, prendrait un thé et irait dormir quelques heures : elle retomberait dans sa solitude si réconfortante. Mais si elle restait, un champ inimaginable des possibles s'ouvrirait. Le mystère de cet homme, son animalisme mélangé à une extrême douceur la poussèrent à sourire, et avant qu'elle eut pu émettre la phrase qu'elle avait préparée dans son esprit, il lui dit dans un murmure :
"Je crois que c'est vous que j'attendais."
PS : si vous avez raté les deux épisodes précédents, retrouvez-les ici : 1er épisode et 2ème épisode. Vous comprendrez : tout est lié !
Le livre fit un bruit sec lorsqu'elle le referma. Décidément, ce livre était trop mauvais, et l'histoire de cette idiote de Joséphine, qui maltraitait tout le monde, et surtout ce pauvre Baptiste, la rendait folle d'écœurement. Les choses ne pouvaient-elle donc jamais être simples, même dans un roman de gare à l'eau de rose ?
Elle se leva et fourra le livre dans une des grandes poches de ce manteau trop large pour elle, qui avait appartenu à son grand-père et auquel elle tenait énormément. Elle se promena sur la grève, emmitouflée jusqu'aux oreilles, le vent caressant doucement son visage. Le soleil dardait ses rayons irisés, diffusant dans son corps cette étonnante chaleur d'hiver qu'elle ne ressentait qu'ici. Elle était si bien, pour rien au monde elle ne serait retournée passer les fêtes dans ce chalet familial où, lorsqu'elle en franchissait la large porte, une bouffée de souvenirs l'assaillaient. Elle n'y était retournée qu'une fois depuis la mort de sa mère, cela lui avait suffit pour décider de n'y jamais retourner. Tout était si triste : ses soeurs qui feignaient la joie et imitaient les gestes que l'on se doit d'accomplir : décorer le chalet, faire un sapin, passer leurs journées aux fourneaux. Et son père, au caractère de plus en plus soupe au lait, qui trainait de pièce en pièce sa douleur et son air d'absence au monde. Sa mère, le pilier de la famille. Elle lui manquait tant. Des larmes inondèrent son visage, rafraichissant ses traits déformés soudain par le chagrin et le souvenir.
Elle sortit d'une autre poche une photo qu'elle gardait toujours avec elle : c'était sa préférée. Elle la regarda tendrement : son père, sa mère et elle, dans un canot aux airs de pirogue, en Afrique, à l'affût d'une gazelle. Ils en avaient vu toute une horde boire au détour d'un coude de la rivière, quelques instants à peine après que le guide eut pris ce cliché. Elle avait été si émue par les bébés gazelles, qu'elle voyait en eux des animaux de compagnie, et même des amis. Elle avait été déchirée en apprenant que sa naïveté d'enfant lui faisait faire de l'anthropomorphisme là où il n'y avait que bêtes sauvages. Dès son retour, elle avait voulu des autocollants de gazelles, et les collait partout car c'était devenu son animal préféré. Sa maman avait été bien patiente de la laisser faire pendant toute cette période. Au souvenir d'une gazelle qu'elle avait collé sur son propre front un jour, elle rit aux éclats et essuya ses larmes du revers de la main, effaçant d'un coup sa tristesse et sa mélancolie.
Le mistral se levait, elle ajusta son col et rangea sa photo pour s'absorber toute entière dans la contemplation de cette mer calme et sombre. Elle distingua une silhouette au loin, qu'elle n'avait pas vue d'abord. En plein soleil, cet homme semblait offrir tout son corps aux mouvements des vents et aux rayons du soleil. Elle se rapprocha, ses pieds s'enfonçant dans le sable fraîchement pelleté qui exhalait une odeur d'algues. A son approche, l'homme eut un sursaut et se retourna brusquement : il était pris en flagrant délit de rêverie. Elle s'attendait peut-être à un homme d'âge mûr, mais certainement pas à cet apollon aux allures d'Indiana Jones d'une beauté indicible et saisissante. Elle s'était toujours imaginé l'homme de ses rêves ainsi : un corps massif et protecteur avec des yeux révélant une profonde douceur. Ils étaient d'une sincérité troublante.
Alors qu'ils semblaient envoutés dans ce silence de la découverte, elle se sentit défaillir sous le poids de ce regard si pur. Elle n'osait pas bouger, et sentait qu'un désir inassouvi s'était brusquement ravivé en elle. Si elle partait maintenant, elle savait ce qu'il se passerait. Elle rentrerait allumer la bouilloire qu'elle avait remplie avant de partir, prendrait un thé et irait dormir quelques heures : elle retomberait dans sa solitude si réconfortante. Mais si elle restait, un champ inimaginable des possibles s'ouvrirait. Le mystère de cet homme, son animalisme mélangé à une extrême douceur la poussèrent à sourire, et avant qu'elle eut pu émettre la phrase qu'elle avait préparée dans son esprit, il lui dit dans un murmure :
"Je crois que c'est vous que j'attendais."
PS : si vous avez raté les deux épisodes précédents, retrouvez-les ici : 1er épisode et 2ème épisode. Vous comprendrez : tout est lié !
Des mots partout des mots pour parler aux nuages!!
RépondreSupprimerj'aime ton texte !!
RépondreSupprimerL'histoire se tient bien et commence à prendre de l'ampleur. :-) J'aime beaucoup. :-)
RépondreSupprimerJe crois que c'est vous que j'attendais. J'aime.
RépondreSupprimerLa suite! vite!
RépondreSupprimerLa naïveté des enfants et leur empathie avec les animaux est très bien rendue. Un texte tout en nostalgie au début Et qui finit sur une note mystérieuse :-)
RépondreSupprimerhou que c'est romantique, ça coule de source ! ;)
RépondreSupprimerJoli ! J'adore le tableau que l'on se fait tout de suite à la lecture de tes mots... La semaine prochaine je m'essaie à l'exercice d'Olivia.
RépondreSupprimer@Douchka : oui, ils m'environnent en ce moment, je ne peux penser qu'à eux!!! C'est grave docteur ??
RépondreSupprimerMerci tout le monde de votre soutien, ça me touche!! Je vais essayer de continuer à vous faire rêver par la suite alors, j'espère ne pas vous décevoir !!